mardi 20 janvier 2015

"Il faut préserver les principes républicains tout en s'adressant aux minorités" (Benjamin Stora)

Radicalisation

A lire dans Le Monde du 19/01, cette interview de Benjamin Stora, historien, spécialiste du Maghreb contemporain. Auteur de nombreux ouvrages, il a récemment publié, avec Abdelwahab Meddeb, une Histoire des relations entre juifs et musulmans (Albin Michel, 2013).
 Il préside depuis août 2014 le conseil d’orientation du Musée de l’histoire de l’immigration.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/01/19/benjamin-stora-il-faut-preserver-les-principes-republicains-tout-en-s-adressant-aux-minorites_4558879_3224.html#L5UCyKb9jjmeCAyy.99



Quelques extraits choisis :

- à propos de la mobilisation de dimanche dernier : "La force du nombre et la volonté de se retrouver ensemble dans l’épreuve ont masqué une dimension essentielle : la faible présence dans la marche des jeunes de banlieues, des populations issues des immigrations maghrébines."

- il parle plus loin de "crise du lien républicain", depuis plus de 10 ans, suite aux émeutes de 2005 et soutient qu'on en connait les origines : "l’effondrement des idéologies collectives, le refuge dans le religieux comme idéologie de substitution aux engagements naguère menés par les gauches (politiques ou syndicales), les retards pris dans le regard porté sur le passé colonial, les crises des sociétés de culture musulmane prises entre des Etats autoritaires et des oppositions islamistes, la tragédie terrible des événements algériens des années 1990 juste après la chute du mur de Berlin, etc. Ajoutons la montée de l’antisémitisme et l’aggravation de la crise économique, avec près de 4 millions de chômeurs…"

- selon lui la transmission culturelle dans une partie importante des immigrations d’origine maghrébine se fait par "bribes de connaissances religieuses, apprises sous l’angle du combat à livrer contre l’autre, entretenues comme des slogans, diffusées par Internet avec une extraordinaire rapidité"
 et il ajoute : "Il faut à ce propos souligner que cette connaissance par Internet se fait bien souvent individuellement, en rupture avec les traditions familiales et religieuses. La fabrication identitaire de ces jeunes se construit par bricolage idéologique, fascination pour la violence, mise en accusation des autres sans concevoir sa propre responsabilité.
"

- et à la question de savoir si les enseignants sont armés pour enseigner cette histoire, il répond : "C’est là le grand problème. Les enseignants ne sont pas assez formés en la matière. Il y a de façon générale un déficit de connaissance des pays du Maghreb chez nos élites intellectuelles. Ce désarmement fait que les élèves et les étudiants d’origine maghrébine ont parfois le sentiment qu’ils connaissent mieux leur histoire que leurs maîtres. C’est une alternative républicaine à cette histoire communautarisée, qui depuis trente ans fait la part de plus en plus belle aux aspects religieux, qu’il faut proposer."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire