dimanche 4 octobre 2015

Ressources et réflexions autour du Projet "Ecocitoyens en herbe"


Pour réfléchir aux enjeux de l’EEDD (éducation à l’environnement et au développement durable), voici un article universitaire intitulé L’éducation scientifique, l’éducation à l’environnement et l’éducation pour le développement durable Croisements, enjeux et mouvances par Yves Girault et Lucie Sauvé remettant notamment en perspective les différentes politiques éducatives sur ces questions en France (et dans le monde), traitant de transversalité, de « classes environnement », d’enjeux scientifiques, etc. : 

Extraits choisis (j’ai mis certains passages en gras ) : 

p.9-10 « pour les acteurs de l’éducation qui associent étroitement la crise environnementale actuelle à la rupture des liens entre les humains, les sociétés et la nature, la démarche éducative privilégiée repose sur le contact direct et l’interaction entre l’apprenant et son environnement. Une telle éducation « par et dans l’environnement » est centrée sur « l’appartenance de l’homme à la nature, participant à la construction d’une personne respectueuse de ce qui l’entoure » (Bachelart, 2006). L’objectif n’est pas d’acquérir des connaissances ni de changer de comportements, mais bien de permettre de s’imprégner physiquement et affectivement de notre environnement, source d’épanouissement personnel : « l’enfant se lie [...] à l’environnement et apprend à s’y trouver ou s’y construire une place à lui. Il apprend à être bien dans le monde en dehors de sa famille et à y trouver une terre d’accueil. [...] En jouant dans la nature, l’enfant échange avec elle et apprend à se sentir bien dans le monde. [...] C’est concrètement qu’il se lie au monde dont il explore et manipule la structure » (Berryman, 2003). 

p.10 : « Ces activités qui privilégiaient « la formation de l’enfant par des études pluridisciplinaires portant sur des sujets correspondant à ses intérêts et réalisées dans son milieu de vie » (ibid.) ont de fait constitué le cadre intégrateur des classes transplantées, dont l’expression n’apparaît qu’en 1971 avec la création des classes vertes, bien qu’elles englobaient les anciennes classes de neige (1953) et les classes de mer (1964). Ces classes transplantées, conçues comme « des classes de vie où le milieu est le centre privilégié de toutes les activités » (circulaire du 6 mai 1971), changeront d’appellation : classes de découverte en 1982, classes patrimoine et classes culturelles en 1988, et enfin classes environnement en 1993. Elles garderont cependant le même esprit : vivre des démarches d’exploration et d’appropriation du milieu. En 1997, le réseau École et nature indiquait que les classes d’environnement constituaient « l’un des dispositifs les plus opérationnels (et les plus utilisés) pour faire de l’éducation à l’environnement ».

p.12-13 : «  D’autres acteurs prennent le devant de la scène : les Parcs naturels régionaux qui, bien qu’apparus à la fin des années 1960, vont monter en puissance dans les années 1970. La plupart des Parcs nationaux voient également le jour à cette même époque. Ces différentes structures ont intégré une mission d’éducation à l’environnement, centrée le plus souvent sur l’apprentissage du fonctionnement des écosystèmes ou de milieux particuliers, sous formes variées de transmission d’informations (comme les sorties guidées ou les sentiers ou panneaux d’interprétation). » 

[…]  1.3. L’éducation pour l’environnement : une posture extracurriculaire
L’éducation pour l’environnement est centrée sur l’objet environnement, le plus souvent dans une visée anthopocentrique et/ou sociocentrique de sécurisation ou d’amélioration des conditions de vie. Il s’agit ici d’apprendre « à résoudre et à prévenir les problèmes environnementaux, de même qu’à gérer les ressources collectives. L’environnement devient un but » (Sauvé, 1997a). En 1992, compte tenu de la prise de conscience de la nécessité de dépasser les enseignements disciplinaires, le Conseil national des programmes précise que l’intégration de l’ÉE dans le système scolaire doit passer « par la réalisation de projets alliant action et réflexion, débordant le cadre traditionnel des apprentissages et nécessitant souvent des sorties hors des lieux scolaires » (cité par Giolitto & Clary, 1994). 

[…] En France, l’éducation pour l’environnement s’impose donc dans les années 1990 (Giordan et al., 1991, 1992) au cours desquelles apparaissent entre autres, selon Giolitto et Clary (1994), la « notion de civisme à l’égard de l’environnement, en sensibilisant les enfants et les jeunes à l’impact de leur comportement sur l’environnement ».

p.14 : «  certains [projets] « mettent en avant les notions de débat ou de conflits d’intérêt, amorçant ainsi l’apprentissage de la démocratie participative et la vision d’une crise environnementale qui est avant tout une crise sociale d’usage et de représentations ».

p.15 : «  2.1. Une prescription internationale

Signe des temps, le développement durable répond à la crise de la sécurité économique et écologique qui caractérise actuellement nos sociétés. Dans la foulée des travaux de la Commission Brundtland, la réflexion sur le rapport à l’environnement au sein des instances internationales s’est orientée dans la perspective du développement durable. 

[…] De la Conférence internationale de Rio en 1992 sur l’environnement et le développement, au Sommet de Johannesburg en 2002 (où l’environnement est désormais évacué du discours), le projet planétaire du développement durable s’est résolument affirmé. Le Conseil économique et social de l’ONU a pris en charge ce projet politico- économique mondial, porté sur la vague de la globalisation. À son tour, le conseil a mandaté l’UNESCO pour coordonner les activités de la Décennie des Nations unies de l’éducation en vue d’un développement durable (2005-2014) et pour stimuler les opérations de réforme de tous les systèmes d’éducation du monde, visant à réorienter les curriculums vers la promotion du développement durable (Sauvé, Berryman & Brunelle, 2007).

p.16 : «  approches systémique et globale des réalités, interdisciplinarité épistémologique et transdisciplinarité curriculaire, partenariats entre les acteurs de la société éducative, ouverture de l’école sur le milieu, pédagogie de projets, apprentissage coopératif, éducation tout au long de la vie... Ce qui change profondément, c’est donc bien le sens de l’action éducative, désormais mise au service d’un développement que l’on souhaite durable et qui s’articule à la jonction de trois sphères : économie, société, environnement (Sauvé, 2007). » 

p.18 : «  À ce jour, la majorité des initiatives ont surtout porté sur des thématiques classiques en éducation relative à l’environnement : la réduction des consommations (robinets, chasses d’eau, éclairages, appareils électriques, emballage, papiers), la gestion des déchets, le transport (covoiturage, pistes cyclables), l’amélioration et la valorisation esthétique des abords de l’établissement scolaire (cour, entrée et espaces verts voisins), la prévention des nuisances sonores. Certaines préoccupations sociales se sont ajoutées, comme la solidarité avec les familles défavorisées, ou l’accès de l’établissement scolaire aux personnes handicapées. Reste à voir si l’intégration des trois pôles du développement durable s’est réalisée et dans quelle mesure le pôle économique a influencé le rapport à l’environnement. 

[…] D’autres initiatives voient le jour. Par exemple, le label Éco-école proposé par l’association Office Français de la Fédération Européenne de l’Éducation à l’Environnement (OF-FEÉE) qui a été mis en place en France en 2005 avec 55 établissements pilotes (écoles, collèges et lycées), à partir de trois thèmes du programme (également des classiques de l’éducation relative à l’environnement) : l’eau, l’énergie, les déchets, l’alimentation. » 

p.19 : (vision critique du DD) selon Hortolan, « une éducation au développement durable ne peut présenter le DD comme un modèle de société. Le développement durable interroge nos modes de vie et nous amène à faire des choix de société, pas à souscrire à des modèles » (2006)

p.24 : «  [certains universitaires] soulèvent un enjeu paradigmatique concernant les diverses éthiques du rapport à la nature. Ils mettent ainsi en lumière la vision « conservationniste » de la nature (comme ressource) et l’utilitarisme économique sous-jacent qui caractérisent le discours politico-économique à haut contenu moral des organisations internationales à propos du développement durable. Ces auteurs proposent une reconstruction du paradigme actuel du développement durable, qui n’a pu contrer jusqu’ici les dérives du développement, en opérant « une sorte de télescopage entre deux univers de représentations, de valeurs et de sens qui se matérialisent dans la construction de types spécifiques de relations Homme-nature », celle qui relève de la vision conservationniste (et anthropocentriste) de Gifford Pinchot et la vision préservationniste (vers un écocentrisme) de John Muir.

p.25 : [à propos de l’EEDD dans les manuels scolaires] « si les concepts d’environnement naturel et d’environnement ressource/problème se retrouvent, peu ou prou, dans tous les manuels, il apparaît que la dimension économique des questions environnementales est le plus souvent absente. De plus, les auteurs observent qu’il n’est fait référence que de manière très implicite aux valeurs et ils notent une absence importante de réflexion critique sur les limites des savoirs scientifiques et sur les travaux de modélisation scientifique. »

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